Madagascar : Le Top 3 des défis Post Covid-19
CO-FONDATEUR & REDACTEUR EN CHEF
Nous avons remporté la bataille de la Covid-19, mais il est important de nuancer que la guerre reste à gagner
En octobre dernier, Rajoelina a déclaré avoir gagné la guerre contre la Covid-19, en soi c’est à la fois un triomphe des plantes médicinales et une belle victoire pour la population Malagasy puisqu’en Europe, c’est la soupe à la grimace, le scénario est noir aussi bien pour les entreprises que les populations. On attend le vaccin, on se reconfine à nouveau pour se protéger de la deuxième vague plus meurtrière que la première de la Covid-19. Mais ces nouvelles réalités, ici et ailleurs, nous projettent déjà dans une perspective mondiale commune et inévitable : la crise économique à venir après la crise sanitaire. On parle d’une récession mondiale. Un autre Tsunami qui va faire des ravages et fait déjà son œuvre de « sélection naturelle ». Seuls les plus agiles et celles et ceux qui ont la capacité de s’adapter vont survivre. Les analystes économiques prédisent un printemps meurtrier en Europe : des milliers d’entreprises vont déposer leurs bilans par suite d’une grande vague de faillite, on parle d’un chômage de masse, et d’une augmentation prévue du taux de suicide. Mais de cette situation planétaire inédite pourrait naitre l’espoir à condition qu’on arrive à se poser les bonnes questions et y apporter les réponses appropriées. La crise de la Covid-19 augure vraisemblablement des nouvelles interrogations : quelles leçons tirer de cette crise sanitaire et quels sont les défis à venir et à relever pour survivre après la Covid-19 ? Si Rajoelina ose dire que nous avons remporté la bataille de la Covid-19, nous pensons qu’il est important de nuancer ces propos, car la guerre reste à gagner. Nous avons sélectionné quelques challenges que Madagascar doit faire faire version post Covid-19.
L’impact sectoriel de la Covid-19 est asymétrique
À Madagascar, s’il y a un secteur très touché par la Covid-19, c’est le tourisme. La fermeture prolongée des frontières avec l’arrêt brutal des flux touristiques ont fortement impacté toute l’industrie du tourisme et mis fin temporairement tout l’espoir mis dans ce secteur. Un sondage Stileex datant juste avant l’apparition du Coronavirus montrait que 95% des Tananariviens pensaient que le tourisme contribue réellement au développement de Madagascar. La Covid-19 a brisé cette attente. Par effet domino, les secteurs du tourisme, de la restauration et de l’hôtellerie tombent tout à tour à terre. Tout cela force le pays à aller en terrain inconnu avec le gigantesque défi : Comment retrouver la croissance en attendant les touristes étrangers ? Il est urgent de transformer ces crises en opportunités et créer des programmes novateurs, accélérer la transformation du pays vers davantage de résilience. Madagascar doit s’engager dans la relocalisation de tous les secteurs de développement économique. L’idée de développer le tourisme local voit le jour et fait son chemin. Cela pourrait être un axe fort d’une politique de reconstruction de l’industrie touristique, mais aussi d’autres secteurs, à l’instar de Pharmalagasy qui est une autre illustration parfaite d’une relocalisation voulue d’une industrie pharmaceutique renaissante un potentiel prometteur.
Crise sociale, insécurité et violence
La Banque Mondiale, annonçait l’aggravation de la crise sociale à travers le monde dans les mois et années à venir, elle estimait que 50 millions de personnes vont vivre avec moins de 2 dollars par jour. À Madagascar, de plus en plus de familles sont touchées par une grande précarité dû à la baisse des revenus. On assiste à une aggravation des inégalités. La perspective d’appauvrissement croissante et généralisée de la population entraine la recrudescence de l’insécurité et de la violence aussi bien en milieu rural qu’en zone urbaine. Nous sommes confrontés au défi immédiat de l’insécurité et de la violence toutes deux d’une ampleur nationale. Ce sont ces trois réalités (crise sociale, insécurité et violence) qui interagissent ensemble et qui font de cette période après Covid-19 un moment extrêmement complexe pour le pays. Il devient urgent de mettre fin à ces violences, de chercher tous les moyens possibles pour assurer un revenu décent à chaque Malagasy, pourquoi ne pas mettre en œuvre un revenu universel pour chaque Malagasy pour lutter contre la crise sociale et retrouver un niveau de sécurité acceptable à l’échelle du pays ?
Manque de moyens et faiblesse des infrastructures étatiques
Nous avons tous été pris par la crainte du pire quand la situation sanitaire était devenue très préoccupante au mois de juillet dernier, les nombres des cas graves augmentaient et les morts ne se comptaient plus par les dix doigts de la main. Au fur et à mesure qu’on constatait l’ampleur de la crise sanitaire, on découvrait que nos personnels soignants étaient épuisés à cause d’une surcharge de travail dû à un sous-effectif chronique, les équipements médicaux étaient rudimentaires, voire inexistant dans certaines villes. L’état ainsi que la population ont été pris de court par la Covid-19. Sans anticipation, les aides internationales constituaient fort heureusement les seules ressources salvatrices pour répondre aux impératifs de santé publique. Avec beaucoup de difficulté, l’État se lançait dans une course pour aider les plus précaires et les plus fragiles. Mais le déploiement de cette aide se heurtait très vite à l’inefficacité opérationnelle des fokontany qui n’arrivent pas à gérer la crise. Il faut admettre que le système, à sa base, au niveau des fokontany, se trouve dans un état fonctionnel et structurel extrêmement critique, inopérant, désorganisé et sans structure. Un système qui favorise plutôt l’entre-soi et le favoritisme, à tout cela vient s’ajouter la corruption. Tout cela constitue des freins qui entravent le développement et l’efficacité de l’État. Se donner les moyens pour anticiper les futures épidémies et renforcer l’infrastructure étatique à tous les niveaux sont par conséquent deux chantiers auxquels nous devons nous attaquer.
Tout cela traduit que certainement la crise de la Covid-19 a déjà entamé ou devrait inciter une transformation profonde du pays. Pour gagner ces défis et ces guerres, il va falloir faire preuve d’audace et d’ingéniosité, cela nécessite aussi de multiples interactions et des nouvelles coopérations à créer entre le public et le privé. C’est dans ce sens qu’il faut concevoir le Madagascar de demain. La crise de Covid-19 est une opportunité de voir naître une nouvelle ambition Malgache.
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