Madagascar : la concertation nationale, premier gage de sécurité ou simple extension de délai ?

Deux mois après les premières contestations sociales à Madagascar, le gouvernement malgache semble avoir gagné du temps en lançant une concertation nationale, destinée à aboutir à une nouvelle Constitution à l’issue de la transition.
Depuis l’éviction d’Andry Rajoelina, le pays manifeste un fort désir de changement et attend une gouvernance capable de raviver l’espoir au sein de la population. Malgré l’absence de décisions majeures sur le plan économique ou social, les préoccupations du peuple demeurent constantes. La Génération Z y joue un rôle notable, consciente que les nouvelles autorités évoluent sur un terrain glissant et qu’il est crucial d’éviter une nouvelle crise politique.
L’ensemble des acteurs de la société malgache suit de près les premiers pas de cette transition, les yeux rivés sur le nouvel homme fort : Mickhael Randrianirina. Si la méfiance s’est d’abord manifestée au sein de la Génération Z, qui a exprimé son mécontentement face à la composition du gouvernement, la refondation malagasy continue de bénéficier d’un relatif crédit, sans que celui-ci soit indéfiniment extensible. Dans ce que l’on peut appeler « l’après 25 septembre », Madagascar semble renouer avec un activisme de la société civile. En effet, d’autres acteurs prennent la parole, comme les évêques, qui ont rappelé aux nouvelles autorités la responsabilité qui leur incombe dans ce processus de changement politique.
D’autres figures, telles que Ketakandrina Rafitoson, s’invitent dans le débat public en gardant un œil attentif sur le plan judiciaire et le sort réservé aux acteurs de l’ancien régime.
La concertation nationale : démocratie participative ou simple stratégie pour gagner du temps ?
À son arrivée au pouvoir, Mickhael Randrianirina évoquait une échéance de deux mois pour que le nouveau gouvernement obtienne ses premiers résultats, une manière d’affirmer une rupture au sommet de l’État.
Visiblement, la prudence — ou la confrontation au réel — a influencé le régime dans la communication du délai nécessaire à la mise en place de la concertation nationale, puisqu’il convient désormais d’attendre trois mois avant son avènement, selon le ministère de la Refondation.
S’agissant du fond, l’idée de recueillir l’avis de la population semble satisfaisante, en garantissant une forme de démocratie participative dans un pays où l’opposition et les autres acteurs s’étaient murés dans un silence notoire. Toutefois, force est de constater que, comme toute présidence installée dans une certaine impréparation — à plus forte raison une transition issue d’une prise de pouvoir intempestive —, la vision politique tarde à apparaître à mesure que les jours s’écoulent.
Le Conseil de la refondation tranche ostensiblement pour trois sujets : l’accès à l’électricité, quand bien même peu de communications ont été partagées depuis plusieurs semaines ; les poursuites juridiques à l’encontre du président déchu Andry Rajoelina, initiées par la ministre de la Justice Fanirisoa Ernaivo ; enfin, la volonté de la présidence de se tisser un réseau d’alliances sur le plan géopolitique, sans toutefois parvenir à dégager une ligne claire et identifiable. Comme trop souvent, le régime éprouve une certaine difficulté à proposer une politique économique capable de rassembler le tissu entrepreneurial local et d’embarquer tout un pays vers la reconstruction ou la refondation tant attendue.
À ce stade de l’analyse, la refondation engagée par les nouvelles autorités ne donne pas encore les signes d’un changement véritablement opérationnel. Au-delà des annonces et des intentions affichées, les marqueurs concrets d’une rupture effective dans la conduite de l’action publique demeurent limités. Le régime semble ainsi évoluer sous la protection tacite de la « grâce des cent jours », ce délai informel traditionnellement accordé aux nouveaux pouvoirs. Une période de sursis qui, si elle n’est pas rapidement mise à profit, risque de s’apparenter moins à un temps de refondation qu’à une simple prolongation de l’attentisme politique.
