
Les îles de la discorde

Le 29 mai 2019, le Président RAJOELINA rendait visite à son homologue français. Les sourires étaient apparents et leurs « jeunesses » respectives donnaient l’illusion de la fin de la françafrique. Une vision archaïque qui n’appartient pas à leurs générations, ouvrant alors la perspective de nouvelles relations bilatérales. Andry RAJOELINA, dans son style habituel, a quelque peu rompu avec la posture diplomatique de ses prédécesseurs en ouvrant le sujet sensible des iles malgaches[1]. Un courage reconnu et admis de tous, après cette première visite en dehors des frontières malagasy. La France a accepté cette ouverture au dialogue, via l’établissement d’une commission mixte, prévue pour le mois de Novembre 2019, tout en précisant avec véhémence que c’était la voie la plus adaptée, au contraire de celle menant au droit international, une formule visant à outrepasser les deux résolutions ONU qui donnent raison à Madagascar.
Restitution ou co-gestion ?
Le Président RAJOELINA a ainsi demandé une restitution ou une « gestion » laissant planer le doute, une manière de ne pas froisser l’un des gros partenaires économiques, sachant qu’intimement, il aspire à une restitution. Outre le discours tenu à l’Elysée, le Président malagasy est allé beaucoup plus loin en affirmant à la diaspora, lors de la conférence du 2 Juin à l’UNESCO, que sa visite diplomatique en France entrevoit, et cette fois-ci de manière ferme, des îles malgaches venant s’adjoindre au restant de la Grande île.. « Ce qui appartient aux Malgaches devraient revenir aux Malgaches… au nom des 25 millions de Malgaches et en mon nom personnel, j’ai demandé solennellement au président Macron la restitution des îles éparses … Les îles éparses ne peuvent être séparées de Madagascar ».
L’attitude de la France
A partir de ces déclarations, la presse française s’est intéressée de plus près à la discorde post indépendance, et a montré des signes d’inquiétude quant au devenir de ces îles aux richesses incommensurables. L’opposition française, via le Rassemblement National (RN), a vilipendé Emmanuel Macron pour avoir ouvert les discussions des iles Malgaches « Le Rassemblement National s’oppose fermement à toute ouverture de négociations avec Madagascar sur la gestion et la souveraineté des îles éparses ».
André ROUGE, ancien du RPR et proche du RN soutenait dans la même lignée, la thèse d’une perte de la souveraineté française dans le magazine Valeurs Actuelles[2]. Emmanuel Macron a eu vent de toute cette vindicte et de la stratégie entreprise par son homologue malagasy. Ainsi, pour montrer sa puissance, il a eu deux nouvelles postures. Une pouvant être qualifiée de très agressive en se rendant sur les îles Glorieuses et en faisant passer le message que ces îles appartiennent bien à la France. Jamais un Président Français ne s’était rendu sur les îles malgaches, optant davantage pour la discrétion, au vu de l’illégalité de la France.
Une stratégie de diversion
Imaginez seulement Vladimir Poutine se rendre sur le sol de la Crimée en plein conflit avec l’Ukraine et dans un contexte international qui ne lui est pas favorable. La deuxième stratégie de l’Elysée est de sortir la carte environnementale qui avantage doublement la France. La conscience environnementale et écologique, impulsés par les accords de Paris, où la COP 21 a donné une force à la France malgré la sortie des Américains. De plus, le Président Macron veut donner l’illusion aux Autorités malagasy que les hydrocarbures ne sont pas si importantes comme le prétendent une majorité de géologues malagasy et français. Emmanuel Macron n’est pas venu soudainement plus « économie verte » qu’ « économie Uber ». Dans l’hypothèse de la co-gestion, emmener les malagasy sur la question de la biodiversité, c’est renouveler un pré-carré français pour donner carte blanche à la France de poursuivre des recherche via la communauté scientifique déjà en place et ayant une renommée internationale alors qu’une priorité donnée aux hydrocarbures reviendraient aux Malagasy de faire jouer la concurrence.
[1] les îles ont un nom officiel : ILES MALGACHES DE L’OCEAN INDIEN, leur qualification et désignation sous le vocable d’Iles éparses a été répudiée car reflètent une approche obsolète qui relève d’une vision coloniale de ces espaces, selon le Professeur RANJEVA.