La culture divise t-elle les hommes ?
CO-FONDATEUR & REDACTEUR EN CHEF
La culture nous divise-t-elle ? Pouvons-nous aller au-delà de la notion de culturalité pour mieux la transcender. Il y a sans le moindre doute une nouvelle pensée à l’échelle du monde avec l’étanchéité des frontières, sans notion de dominant/dominé où seul le respect prend le dessus. Car au final, nous ne sommes qu’un : « Iray ihany isika » comme le rappelle le lancement du programme d’action du Ministère de la Communication et de la Culture, le 5 octobre dernier à Tuléar.
La diversité, une force incomprise
Parler de culture est un sujet intarissable à Madagascar, mais faire dialoguer les cultures relève de l’exceptionnel du fait de toutes les questions qui en découle. Cela nécessite en conséquence des efforts, de la bonne volonté et demande de la compréhension en plus d’un grand esprit d’ouverture. Si la culture distingue, du nord au sud, de l’est à l’ouest, cela s’explique par les 18 ethnies composant Madagascar. Cette diversité de peuples est une richesse en soi car elle renforce l’isolement dû à notre insularité. Chacune des ethnies est différente, avec ses us et coutumes. Néanmoins il faut admettre qu’un véritable échange entre ces 18 ethnies n’existe pas, bien que ce soit possible, comme en témoigne la réussite d’une intégration multiculturelle à Tananarive, au sein de la capitale, où toutes les ethnies se côtoient et vivent en paix. Mais trop souvent, nos différences nous enferment, nous poussent à tenir des discours et des propos xénophobes et clivant, nous rappelant la propagande utilisée par les colons pour asseoir leur domination. Certes, la colonisation nous a laissé une blessure culturelle profonde, elle nous a mal appris à regarder nos différences, les réduisant à un facteur de hiérarchisation et de classement. Le complexe culturel qui en résulta nous poussait soit à aplanir notre diversité, soit à créer les fondements des extrémismes ethniques voire élever des murs de castes au lieu d’en constituer notre force.
L’égalité dans l’unicité
Par exemple, le fait de dire – Je suis Merina est devenu un facteur de clivage et de division à Madagascar. Mais soutenir cette affirmation, c’est reconnaître en moi, tout l’héritage culturel, génétique, biologique et linguistique que je porte avec toute l’histoire de cette grande aventure humaine que j’embrasse volontiers. Je ne suis pas mes ancêtres ce qui me permet d’être librement fiers ou non d’eux. Mais, dans le contexte sensible d’ethnisation, je me dois de faire, avant tout, abstraction de toute tentative de complexe de supériorité. Aussi, dire – Je suis Sakalava affirme ma culture mais n’efface pas mon identité Malgache ce qui me rend identique et égal à tous les Malgaches. Et c’est seulement dans ce cas que la culture apparait comme le socle de l’unité du pays, le trait d’union qui crée l’espace pour faire dialoguer sur nos différences, pour comparer, et apprendre de l’autre sans aucune aversion.
Le dialogue et l’acceptation de l’autre comme solutions
Andry Rajoelina sera l’invité d’honneur du Forum de Rhodes (11 et 12 octobre), consacré au dialogue entre les civilisations. Parler de dialogue des civilisations c’est parler identité, affirmer nos différences sans les aplanir mais avant d’arriver à un stade d’évolution où les civilisations se regroupent et deviennent solidaires au-delà de leurs différences, il faut amorcer d’ores et déjà le dialogue à l’échelle locale, au village dans les districts et les communes. La meilleure façon de le faire c’est d’apprendre à se connaître et à accepter une vision différente de la nôtre. À Madagascar, pourquoi ne pas envisager une bourse « voyage découverte » pour les jeunes, chaque jeune malgache, ayant obtenu sa majorité, voyage au moins une fois dans sa vie pour découvrir une autre culture à sa portée, dans les frontières de l’île. Cela leur permettrait de voyager dans le pays, aller à la découverte de leurs voisins et de leurs compatriotes. Non seulement cela renforcera la solidarité nationale mais aussi la paix qui éloignera les guerres tribales que certains politiciens véreux haranguent, à chaque fois et à chaque période électorale pour arriver au pouvoir. Pour répondre à la question sus-posée : Non ! la culture nous unit plus que jamais !