Madagascar, maintenir la volonté politique
CO-FONDATEUR & REDACTEUR EN CHEF
Spécialisé dans la communication et l’analyse politique. Il intervient notamment sur les médias spécialisés sur l’Afrique.
gregory.sileny@madagascar-media.com
Andry Rajoelina est plus proche de la fin de son quinquennat, qu’à son commencement. En arrivant au pouvoir, comme tout président, il suscitait l’espoir, le soulagement aussi, après des années de tension et d’incertitude. Cependant, aucun observateur de la vie politique malagasy n’aurait pu pressentir la pandémie qui a ébranlé le monde dans son entièreté. Si l’Afrique est épargnée en vie humaine, les économies en pâtissent.
La crise sanitaire a donné toute une autre tournure dans l’exercice du pouvoir pour le gouvernement Ntsay, en obligeant à réagir systématiquement. La schizophrénie bat son plein, entre le maintien d’une politique qui vise à se limiter à la gestion sanitaire et la poursuite d’une ambition qui devait propulser Madagascar dans l’émergence par le biais d’infrastructures nouvelles. Plus qu’une nécessité, celles-ci devaient créer de l’emploi, attirer les investisseurs et générer de la croissance inclusive. Toutefois, à Madagascar, tout semble demeurer plus complexe à en presque oublier le famélique pouvoir d’achat de la population ou le taux de pauvreté endémique. La gestion d’un pays comme Madagascar a de quoi freiner l’ambition de pléthores de politiciens tant la gouvernance est périlleuse. Tous les présidents successifs en ont fait l’amère expérience. L’économie informelle dominante, avec ses 93 % de l’activité de la Grande île, est un frein manifeste au développement. Elle empêche le développement d’un système bancaire, l’augmentation de recettes fiscales ou tout simplement d’élever une population indigente dans sa majorité. Sans évoquer les conditions météorologiques qui créent quant à elles des inégalités sur le territoire, et plus étonnant, la position insulaire de Madagascar devient presque un handicap alors que celle-ci est un atout géostratégique.
Les contraintes de la mondialisation à Madagascar
Madagascar, avec le tourisme, l’exportation brute de ses matières premières notamment, privilégie une économie tournée sur le monde. Tributaire de ses grands partenaires commerciaux, des consommateurs étrangers et aussi de sa diaspora, or avec la Covid-19, toute cette manne financière a été considérablement réduite. L’aide accordée à un Pays moins avancé (PMA) comme Madagascar redevient primordial et un instrument de servitude. Pour toutes ces raisons, cela devient encore un sujet de débat à Madagascar, dans le choix stratégique à définir, pourquoi ne pas revenir à une politique qui priorise sur son économie intérieure ? Le piège de la gouvernance est de poursuivre sur ce qui n’a pas marché. Les recettes de l’ancien monde à l’échelle malagasy ont produit de maigres résultats : croissance « extravertie ou exclusive », autrement dit une richesse qui ne profite pas aux malagasy, une fracture dans l’accès aux services publics, une décentralisation inopérante… C’est pourquoi, si la crise sanitaire induit un « repli sur soi », il convient d’y trouver des ressources endogènes pour encore entrevoir l’émergence pour les dix prochaines années.