France / Zone interdite : Documentaire de la peur ?
CO-FONDATEUR & REDACTEUR EN CHEF
Spécialisé dans la communication et l’analyse politique. Il intervient notamment sur les médias spécialisés sur l’Afrique.
gregory.sileny@madagascar-media.com
Le reportage de Zone interdite se présente en pleine campagne présidentielle ce qui est loin d’être anodin. Une polémique qui pourrait en voir d’autres, dans un climat où l’insécurité et le vivre ensemble sont autant de sujets qui ne laissent pas insensibles les Français. Au-delà du battage médiatique, ce reportage, choquant dans tous les sens du terme, ne doit pas pour autant éviter de s’interroger sur l’évolution de la société française. Diffusé dimanche soir sur M6, ce documentaire intitulé « Face au danger de l’islam radical, les réponses de l’état » n’a pas laissé insensible et pourrait marquer une autre étape dans la montée du communautarisme. Les défenseurs des minorités se sont insurgés sur le contenu du reportage, jugé à charge.
La France insoumise, parti de Jean-Luc Mélenchon, via sa branche jeunesse, s’est inscrite sans surprise dans cette lignée demandant jusqu’à interdire sa diffusion quelques jours avant. Que les musulmans soient offusqués ou se désolidarisent de telles pratiques, cela est tout à fait compréhensible. Mais nier, ce qui apparaît à l’image et à nos écrans avec la tentative d’une frange de la population de se dissocier de la communauté nationale, appelée la République devient une évidence pour beaucoup ou un déni pour certains. Défendre l’indéfendable sous prétexte d’y voir une atteinte à l’Islam est périlleux car les protagonistes du reportage ont choisi un camp. Celui-ci est à l’antithèse des valeurs de ce pays, qu’on appelle encore et pour combien de temps : la France. Jouer à des poupées sans visage, pourquoi ne plus jouer aux poupées tout court dans un esprit de sagesse, ne plus se soumettre aux fondamentaux du vivre ensemble comme saluer des collègues « femmes » au travail (sous prétexte ce sont des reines selon son auteur dans le reportage), prier au pied de l’escalier d’une université, manger dans des restaurants avec parties réservés à des femmes voilées.
Des intellectuels musulmans s’insurgent contre le consumérisme, considéré comme étant le mal français, ce qui suscite aussi des conversions, cependant, considérer le fondamentalisme religieux comme réponse au consumérisme, cela devient ubuesque et amène à se poser la question suivante : où se situe l’équilibre de ces dits pratiquants ? Il est dit que ce sont les Américains qui ont enfanté le monstre Daesh, cela devrait donc amener à se demander qui a enfanté ce radicalisme et séparatisme de l’intérieur ? Les protagonistes du reportage sont intimement convaincus de leurs bonnes intentions, de la défense de leurs valeurs et de leurs identités. Leur zèle interpelle. In fine, c’est semble-t-il ce côté jusqu’au-boutiste qui inquiète le plus, sachant qu’il semble attirer de plus en plus de laissés pour compte.