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La contestation de la Génération Z : Quand une classe politique peut en cacher une autre… ?

La contestation de la Génération Z : Quand une classe politique peut en cacher une autre… ?
Le 25 septembre 2025, le peuple malagasy est sorti de son silence pour exprimer son profond mécontentement face à un pouvoir marqué du sceau de l’inefficacité, incapable d’assurer les droits les plus élémentaires : accès à l’eau, à l’électricité et à la nourriture.
Portée par une jeunesse déterminée, la succession de rassemblements massifs a fini par provoquer la fuite d’Andry Rajoelina, ouvrant la voie, quelques jours plus tard, à la prise de fonction du colonel Mickael Randrianirina.
De l’extérieur, il serait tentant de voir dans ces événements les signes d’un changement radical. L’élan et l’enthousiasme de la Gen Z malagasy semblent en effet annoncer une ère nouvelle.
Cependant, comme dans tout mouvement de contestation ou de refondation, deux questions demeurent essentielles :
Qui finit par s’emparer du mouvement, et quelles orientations politiques en découleront ?
Si le second point reste encore trop prématuré pour une analyse approfondie — même si le délai fixé à deux mois pour obtenir des résultats permettra d’y voir plus clair —, le premier soulève déjà des interrogations. Les hommes aujourd’hui à la tête de la contestation, sous la houlette du nouveau président de la Refondation de la République malagasy, incarnent-ils réellement les aspirations profondes du peuple ?
La contestation de la Génération Z : Quand une classe politique peut en cacher une autre… ?
La contestation de la Génération Z : Quand une classe politique peut en cacher une autre… ?

L’illusion d’une nouvelle classe politique ?

Le colonel Randrianirina n’est pas un inconnu dans le paysage politique malagasy, tant décrié depuis plusieurs années. Si Andry Rajoelina a servi de fusible et de symbole des maux qui minent la gouvernance du pays, les problèmes d’accès à l’électricité ou à l’eau, eux, ne datent pas d’hier.
Désormais, chacun connaît le passé de gouverneur du nouvel homme fort de Madagascar, dans la région d’Androy. Mais son entourage familial soulève aussi des interrogations : son frère cadet, Briand Joseph Randrianirina, a occupé d’importants postes sous la présidence d’Hery Rajaonarimampianina, notamment celui de secrétaire général du ministère des Postes, des Télécommunications et du Développement numérique.
L’épouse de ce dernier, Onitiana Realy Voahariniaina, fut quant à elle ministre de la Population durant le même quinquennat. La proximité du couple avec l’ancien président ne fait guère de doute — celui-ci ayant même assisté à leur mariage en 2017.
Il ne s’agit pas ici de faire des amalgames ou des associations hâtives : ces éléments concernent avant tout les personnes elles-mêmes. Mais ils offrent un éclairage utile sur les réseaux et cercles d’influence qui entourent le nouveau pouvoir, au moment où le gouvernement vient tout juste d’être nommé.
Pour mémoire, Onitiana Realy Voahariniaina avait été accusée de détournement de fonds publics en 2019. Bien qu’elle ne soit plus active dans les affaires publiques et que son nom ne soit pas associé à l’actuel pouvoir, elle reste proche du nouveau président de l’Assemblée nationale, Siteny Randrianasolona.
De leur côté, plusieurs figures du nouveau gouvernement, telles que Christine Razanamahasoa (Affaires étrangères) et Fanirisoa Ernaivo (Justice), partagent un point commun : toutes ont été opposées ou hostiles à l’ancien président Andry Rajoelina.

Éviter la chasse aux sorcières

Fanirisoa Ernaivo, proche de Marc Ravalomanana et candidate à l’élection présidentielle de 2018, avait été révoquée en 2019 du corps de la magistrature. Très active en France dans son opposition à Andry Rajoelina, elle incarne aujourd’hui une figure de la justice vigilante.
Mais beaucoup attendent d’elle qu’elle évite toute politique du talion, qui serait néfaste à l’image et à la démocratie malagasy.
Le contexte actuel exige un équilibre délicat : transformer la colère populaire en véritable projet politique sans basculer dans la revanche.
Si la contestation de la Génération Z a suscité un immense engouement populaire et nourri un désir profond de refonte du système politique malagasy, une chose semble déjà certaine : une classe politique en a remplacé une autre.
Autrement dit, l’opposition à Andry Rajoelina est sortie victorieuse — non pas des urnes de 2023, mais bien des rues du 25 septembre 2025.
Le souffle révolutionnaire porté par la jeunesse a ouvert une brèche historique ; reste à savoir si ceux qui s’y sont engouffrés seront les artisans d’un véritable renouveau, ou simplement les héritiers d’un système qu’ils prétendaient dénoncer.

A propos de l'auteur

Gregory SILENY

CO-FONDATEUR & REDACTEUR EN CHEF
Spécialisé dans la communication et l'analyse politique. Il intervient notamment sur les médias spécialisés sur l'Afrique.
gregory.sileny@madagascar-media.com

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