
MAGA 2.0 : la politique du choc

Rares sont les semaines, si tant est qu’il y en ait une, où le président américain n’y va pas de son petit commentaire politique depuis son investiture au mois de janvier 2025. Tout y passe : les affaires domestiques, les guerres actuelles en Ukraine, à Gaza et en Iran, le Travel Ban avec la liste des pays sanctionnés — principalement africains, au demeurant —, la guerre commerciale et ses dommages collatéraux visant en priorité la Chine et l’Union européenne…
Donald Trump avait laissé entendre sa position durant sa campagne ou dans ce qu’il a laissé volontairement fuiter via le « projet 2025 » : celle d’être plus radical, plus direct, et d’assumer sans filtre sa vision du pouvoir. Une promesse qu’il a, depuis, largement mise à exécution. Les records de décrets pleuvent, 165 depuis l’investiture. Chez Donald Trump l’action a une prééminence sur la pensée, l’effet immédiat devient une recherche constante à défaut d’une stratégie ou une politique structurelle.
Dans l’Amérique de Donald Trump, le MAGA (Make America Great Again) n’est plus seulement un slogan : il devient la matrice idéologique d’un repli stratégique. L’administration rejette toute forme de multilatéralisme au profit d’un nationalisme politique et économique assumé, où le monde extérieur est perçu comme une menace constante à la souveraineté américaine. Les alliances d’hier, y compris celles qui semblaient immuables à l’image de celle qui a été solidement bâtie entre européens et américains, sont remises en cause ou balayées d’un revers de main.
Cette posture trumpienne se manifeste clairement à travers les nouvelles vagues de droits de douane punitifs, notamment envers l’Europe et la Chine, que même certains États fédéraux américains critiquent frontalement, préférant des solutions négociées pour limiter les effets de bord. En effet, au cours du mois d’Avril, dix États du nord-est des États-Unis ont invité des premiers ministres provinciaux canadiens à une rencontre à Boston dans le but de contourner cette nouvelle politique tarifaire aux effets dévastateurs. La politique commerciale américaine devient ainsi un outil de tension autant externe qu’interne. À titre d’exemple, Donald Trump a imposé des hausses tarifaires pouvant atteindre 145 % sur les produits chinois, avant de reculer brusquement à 30 % — voire 25 % pour certains secteurs — sans justification claire, illustrant une politique commerciale improvisée, souvent dictée par l’instinct plus que par une stratégie économique cohérente. Le Travel Ban, quant à lui, illustre parfaitement cette logique de cloisonnement du territoire, sous couvert de sécurité nationale. Il ne s’agit pas seulement d’empêcher des personnes d’entrer sur le sol américain, mais de désigner des boucs émissaires étrangers, dans un narratif politique où l’ennemi est toujours « l’étranger » qu’il soit à dimension humaine ou étatique : Tout étranger devient une menace dans la doctrine trumpiste.
Toute cette politique, fondée sur le rejet de l’extérieur, tend en réalité à ne servir que les intérêts « américano-américains », dans une logique extrémiste et nationaliste. Il s’agit de la forme trumpienne. Toutefois, subsiste un paradoxe qui semble échapper au président américain : Vouloir faire cavalier seul dans un monde profondément interconnecté et mondialisé où chaque décision protectionniste impacte aussi bien les pays étrangers que le pays commanditaire, en l’occurrence les Etats-Unis. Faire l’apologie d’une vision souveraine n’a jamais autant apparu si utopique, qui plus est dans une ère d’interdépendance, où il apparaît encore plus évident que se couper des autres revient finalement à se fragiliser soi-même. Est-ce que Donald Trump sera prêt à revoir sa politique MAGA. Rien n’est moins sûre.