Est-ce que Madagascar est sous perfusion financière ?
CO-FONDATEUR & REDACTEUR EN CHEF
Spécialisé dans la communication et l’analyse politique. Il intervient notamment sur les médias spécialisés sur l’Afrique.
gregory.sileny@madagascar-media.com
Comme à l’accoutumée, Madagascar a « encore » reçu une aide financière de la Banque Mondiale, cette fois-ci, d’un montant de 150 millions de dollars. Ce nouveau prêt entre dans une volonté de soutenir l’activité des entreprises locales notamment. L’objectif serait d’atteindre une croissance inclusive, une expression que chérit la Banque Mondiale.
À chaque fois qu’une aide financière est obtenue, il y a comme la sensation d’un vent frais qui accompagne les dirigeants malagasy. Les émissaires des institutions internationales, autrement dit les bailleurs de fonds, sont accueillis en grande pompe, tout le monde médiatico-politique connaît David Malpass, l’actuel Président de la Banque mondiale. En revanche, il apparaît moins évident que son nom jouisse de la même résonance en France ou plus près de chez nous du côté du Maroc ou ailleurs, au Brésil, par exemple. De manière plus approfondie, tout financement accordé pourrait s’apparenter comme une bonne nouvelle, encore plus dans la crise économique à laquelle est englué Madagascar. Le questionnement se situe à un autre stade, pourquoi Madagascar continue de communiquer sur ces aides financières sur le même procédé, réduit à l’image d’un pays démuni, toujours placé sous la tutelle des mêmes institutions que décriait un certain Didier Ratsiraka dans les années 80-90 ?
Revoir le mode de communication politique ?
Tout le monde s’accordait à dire au moment du décès de l’Amiral, qu’il était plein d’audace, un patriote, un artisan d’une politique d’État providence, mais pourquoi ne pas s’inscrire dans cette tradition ou cette histoire politique un tant soit peu ? Si les autorités malagasy communiquent sur les montants des financements dans une optique de transparence, une approbation de tous les acteurs, y compris de la société civile, en découlera. En revanche, présenter une politique toujours sous le seul angle du financement obtenu, affaiblira indéniablement celui qui en est le bénéficiaire. Autrement dit, l’État doit toujours rester maître de sa politique avec la définition d’un projet, d’un plan d’action, la feuille de route avec date d’échéance et seulement après, viendra la communication pour annoncer que cette politique se fera par le soutien de la Banque mondiale qui accorde un financement dédié au plan précité. Cette rhétorique et cette vision doivent être partagées, singées par le politique quel qu’il soit.
Quid de la politique de gestion sur du long terme ?
Les opposants pointent depuis l’avènement de la Covid-19, la succession importante d’aides financières qui demeurent justifiées, néanmoins. Si Andry Rajoelina avait dû gouverner en 2009 en autarcie, sans aucune aide financière, presque 10 ans après, en raison de la situation sur le plan international, sa gouvernance compose avec une multitude de financements dans des secteurs relativement variés. La vigilance se situe sur le remboursement qu’il faudra déployer en retour, et sur la capacité à trouver d’autres niches de revenus sans recourir à cette aide qui, en réalité, en est tout sauf une.