Grand Sud, l’heure à l’inventivité !
CO-FONDATEUR & REDACTEUR EN CHEF
Spécialisé dans la communication et l’analyse politique. Il intervient notamment sur les médias spécialisés sur l’Afrique.
gregory.sileny@madagascar-media.com
Des femmes du Sud de Madagascar se sont mobilisées pour ne plus subir le Kere (grande famine). Se lançant dans la transformation en produisant du Gari, une farine extraite à partir du manioc, ce processus de production a permis à 38000 habitants de ne plus subir la famine.
À coup sûr, des détracteurs avanceront au sujet du gari la métaphore d’une goutte d’eau dans l’océan, d’autres viendront dénoncer la fragilité des autorités locales. Pourtant, le Kere est un phénomène, loin d’être nouveau, qui sévit à Madagascar depuis plusieurs décennies sous des appellations différentes, venant pointer la faiblesse de l’État central depuis l’indépendance. «Santira vy» était le nom pour décrire les intempéries dans les années 80 (En français Ceinture de Fer) ou encore au début du siècle présent, nous parlions de « Arikatoke » (tous touchés par le Kere). Le Kere est donc lié au changement climatique avec une période de soudure située entre octobre et juin. Un impact sans équivalent sur la Grande île puisque 1 million et demi de malagasy sont touchés, amenés à se déplacer ou subir de plein fouet les ravages de la famine.
L’absence de structures étatiques, des infrastructures déplorables, notamment au niveau du réseau routier, une économie importatrice et dépendante des autres régions du pays, et enfin, presque toujours l’appel incessant des aides extérieures à tous les niveaux, voici le lot quotidien pour ces malagasy. Face à ce constat sans appel, Andry Rajoelina a donné un horizon afin de remédier définitivement à cette catastrophe sociale et sanitaire sur le sol malagasy, en fixant l’année 2021 comme issue favorable.
Des populations livrées à elle-même mais inventives
À trop attendre des solutions exogènes, on en oublie que cette dernière pourrait provenir des populations elles-mêmes. À l’image de ces femmes qui ont intégré qu’il fallait changer les habitudes alimentaires, redéfinir leurs forces de travail et par extension, leurs moyens de production. Non seulement le Gari a permis de favoriser le processus de transformation de la production mais en plus de créer un produit consommable et non périssable capable d’éradiquer le Kere. La production du Gari est aujourd’hui généralisée à 3 régions du Grand Sud et 18 communes ont déjà adopté cette pratique plus que vertueuse. Cette initiative résume la potentialité des populations évoluant dans un environnement hostile, où trouver des opportunités paraît fort improbable, à cause de la dangerosité des conditions de vie. Par cette ingéniosité à l’échelle locale et régionale, qui doit certainement être associée au rôle des ONG et d’acteurs étrangers, les femmes malagasy démontrent qu’elles sont une partie de la solution même si l’État devra aussi être présent. In fine se dresse à travers cet exemple de parade l’une des clés pouvant agir durablement et positivement pour Madagascar, à savoir un attelage entre société civile et pouvoirs publics.