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Didier Ratsiraka : Quelle histoire raconter ?

Didier Ratsiraka : Quelle histoire raconter ?
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La fabrique des héros

Didier Ratsiraka, l’ancien président Malgache est décédé à l’âge de 84 ans, le 28 mars à l’hôpital militaire de Soavinandriana à Antananarivo. Loin de ses années de gloire lorsqu’il était aux manettes du pouvoir, les dernières années de sa vie lui faisaient sentir que le vent a tourné, malgré ses tentatives de retour au pouvoir ratées, il avouait avec une pointe d’amertume lors d’une récente interview sa triste perception en se disant que « – Les gens ne nous aiment pas ». De son vivant, cette grande figure de la politique malgache était considérée comme un prophète qui ne faisait pas l’unanimité dans son propre pays, il était à la fois une personnalité admirée mais aussi controversée, voire détestée. Son enterrement au Mausolée d’Antananarivo est une volte-face historique non négligeable qui lui offre des nouvelles perspectives historiques. Sa mort le fait rentrer dans un processus de fabrication de héros. Désormais, avec l’héroïsation posthume de Ratsiraka, Andry Rajoelina, l’actuel président, fait appel au symbolisme et donne sa propre version de l’histoire de Madagascar. Une certaine idée de Didier Ratsiraka s’efface, et une autre émerge dans les Champs-Élysées des héros. On assiste à une mutation posthume de l’histoire du pays. Ce lieu de mémoire collective lui confère une nouvelle image, une nouvelle identité, celui d’un héros national. Mais l’était-il vraiment ?

Héroïsation controversée

Le mausolée d’Avatr’Ambohitsaina à Antananarivo est un lieu de mémoire collective. On y enterre les héros du pays, notamment des grands personnages politiques, des nationalistes malgaches qui ont pour point commun d’avoir brillé par leur patriotisme. Ils ont été élevé au rang de héros national, des patriotes, des personnalités courageuses qui ont lutté contre la colonisation et les travaux forcés, notamment lors des évènements de 1947. Ratsiraka devient le 13ème « héros » en dépit des attributs négatifs qui lui sont attachées : Deba (le méchant), l’amiral rouge, le dictateur, etc.. Ce lieu, à la fois nécropole et à la fois mémoriel étant un territoire approprié pour témoigner d’un passé commun à tous les Malgaches, l’enterrement de Ratsiraka au Mausolée d’Antananarivo pose question. Assistons-nous à une manipulation de la mémoire collective ? Bien que Ratsiraka était considéré par certains comme un patriote intelligent, un héraut de la souveraineté malgache de part ses actions pour les iles éparses, de ses luttes contre le colonialisme etc. le décalage reste important entre la drame vécue par la population malgache pendant ses 23 ans de règne politique marquées par les censures, les contrôles stricts des expressions des idées et la réécriture actuelle de l’histoire portée au cimetière des héros. Indéniablement, le mausolée reste associé dans l’imaginaire des Malgaches au domaine des héros mais pas d’un ancien patriote-dictateur. Alors quelle histoire raconter ou quelle histoire veut-on effacer ? Un travail plus approfondi de l’histoire par nos historiens est plus qu’indispensable.

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