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Madagascar 60 ans après • Les grandes figures de la résistance Malagasy

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 Jean RALAIMONGO – Père du nationalisme Malagasy

Jean RALAIMONGO

Au début de l’intrusion coloniale à Madagascar, le pays connaissait déjà une diplomatie affirmée et reconnue par l’une des grandes puissances de cette époque-là, en l’occurrence le Royaume-Uni. Il va sans dire que cette colonisation ne s’était pas facilement passée à Madagascar, le pays ne s’était pas soumis de bon gré aux conquérants. Partout, les envahisseurs s’étaient heurtés à une résistance énergique. Ce n’était qu’avec l’aide de quelques traîtres, que les colonialistes réussirent à s’emparer du Palais de la Reine, symbole ultime de la souveraineté du pays, et entrainèrent le pays dans une politique assimilée à l’impérialisme. Qui sont ces résistants ? Ces héros à qui nous devons aujourd’hui l’indépendance et la souveraineté du pays ?

Parmi les grandes figures de la résistance Malagasy, il y avait Jean Ralaimongo (1884 – 1943), on peut dire que c’est lui le Père du nationalisme Malagasy. S’il y a des noms à retenir pour illustrer l’indépendance de Madagascar, celui de Jean Ralaimongo ne doit pas être oublié, il est à l’origine du mouvement national Malagasy, véritable homme politique, Jean Ralaimongo fut l’un des Malagasy qui a permis d’écrire l’histoire de l’indépendance du pays, maîtrisant parfaitement le français, il fut l’un des premiers à résister aux colons Français, il réclamait « l’usage de toutes les libertés démocratiques ». Il avait passé sa vie toute entière pour l’indépendance de Madagascar. Il est notamment le fondateur de VVS1, mais aussi du MDRM2.

Un humaniste passionné de la liberté et de l’égalité pour tous

Malgré son enfance difficile, Ralaimongo se hisse dans la société Malgache en devenant instituteur. Il parvient à poursuivre ses études en France et acquérir le titre d’instituteur français, un métier qu’il abandonne rapidement.  Son retour à Madagascar en 1921 sera aussi le début de sa lutte pour l’égalité des droits entre les malgaches et les français. Il dénonce les abus et pratiques de certains colons. Son parcours sera désormais semé d’embuches : arrestations, amendes, emprisonnements, liberté surveillée, saisie de publications et intimidations. Le gouverneur général de cette époque Hubert Garbit lui propose la somme de 250 000 F et insiste à ce qu’il s’engage à renoncer à ses idées. Mais Ralaimongo maintenait son refus. Il continuait à utiliser la presse coloniale pour l’accession des indigènes de Madagascar aux droits de citoyens français.  Dans cette lutte, la presse lui apparaît comme un moyen par lequel il est possible non seulement d’entretenir le mouvement existant, mais surtout de l’amplifier. Il fera face également aux hostilités des imprimeurs. C’est alors qu’il commande de France une imprimerie, et crée son propre journal l’Opinion. Il fut traité d’escroc, de communiste et de fripouillard. Ralaimongo publie un journal en langue française au lieu d’utiliser le malgache qui aurait été compris par un plus grand nombre. Selon lui, L’Opinion doit permettre d’agir non seulement à Madagascar, mais aussi en France. Tout de suite, L’Opinion attaque deux importants sujets : le Service de la main d’œuvre des travaux d’intérêt général (S.M.O.T.I.G.) et l’organisation de la propriété foncière. Le succès de L’Opinion fut immédiat. Il publie dans L’Opinion sous le pseudonyme de Gaston Razanakolona. L’évolution de l’opinion et la sympathie que rencontraient les idées de Ralaimongo et de ses amis, leur apprirent qu’une étape était franchie. Le terrain était prêt pour une action de grande envergure qui devait précipiter le mouvement.

De l’usage de la liberté démocratique à l’indépendance

Par crainte Léon Cayla, le gouverneur général de l’époque, le 31 mai 1930, à la stupéfaction de tous, décida d’assigner à résidence pour cinq ans Ralaimongo à Port- Bergé. Ralaimongo est mis hors de course. Cet exil va changer sa façon de mener sa lutte : Ralaimongo se contente de démontrer les contradictions de la situation coloniale et de dresser une critique violente et continue. Ralaimongo revendique l’indépendance. Il est passé de la revendication de l’assimilation à celle de l’indépendance, Ralaimongo utilise les nouvelles méthodes de protestation inspirées de Gandhi. Parallèlement la répression s’accentue. Il continue à dénoncer les abus et les brutalités de la colonisation. Ralaimongo semble las en 1939, et lorsque la guerre éclate, cet homme, qui n’a que 55 ans, est un homme vieilli avant l’âge. Pendant 25 ans, il n’avait pas ménagé sa santé. Les privations et les fréquents séjours en prison avaient aussi eu leur part dans son affaiblissement. Il mourut le 10 août 1943. Jean Ralaimongo ne verra point son rêve réalisé mais il a semé les graines de l’indépendance. 4 ans après sa mort, éclatait l’insurrection de 1947. Des nombreux malgaches mourraient dans une atroce barbarie lors de ce mouvement d’insurrection pour la liberté. Mais cela n’empêchait la poursuite de la lutte jusqu’en juin 1960 pour la proclamation officielle et historique de l’indépendance de Madagascar.

Ralaimongo écrivait ces mots à son fils Samuel : « Je peux mourir aujourd’hui, mais Ralaimongo jamais plus, il y aura toujours des Ralaimongo vivants. Il faut que tu sois digne de ce nom, non par la fortune, mais bien par l’honnêteté, le caractère, le courage et la bravoure. Je n’ai qu’une ambition : quand je ne serai plus de ce monde, que l’on puisse dire sans flagornerie : « II a fait quelque chose de bon pour ses semblables avant de mourir », et j’en serai satisfait — bien satisfait même »

En 2019, Madagascar demande toujours de parachever cette indépendance en demandant la restitution des îles Malgaches de l’Océan Indien, prise arbitrairement par la France.

Fabien RAZAKANDRAINIBE, Editorialiste.

Nota Bene : Nou avons utilisé l’article de Jean-Pierre Domenichini pour dresser ce portrait succinct de Jean Ralaimongo. Pour plus de détail référez-vous à l’article3

[1] Vy Vato Sakelika ou VVS : Association de jeunes patriotes, fondée avant 1914 qui fut accusé d’avoir comploté l’empoisonnement de tous les français en 1915 ; Les membres de cette association furent arrêtés dans des conditions contestables. La plupart de ses membres appartenaient à l’Union Chrétien de Jeunes Gens fondé par Jean Beigbeder.

[2] MDRM : Mouvement Démocratique de la Rénovation Malgache. Premier parti politique malgache fondé le 22 février 1946, dirigé par une partie de l’élite malgache

[3] Jean Ralaimongo (1884-1943), ou Madagascar au seuil du nationalisme.  J-P Domenichini. La revue Française d’histoire d’Outre-Mer. Année 1969 | 204 | pp. 236-287

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